Embauche d’un salarié en CDI suite un CDD (ou un contrat de mission) : une procédure particulière à respecter depuis le 1er janvier 2024
Sources : loi dite « Marché du travail » n°2022-1598 du 21 décembre 2022 – décret d’application n°2023-1307 du 28 décembre 2023 publié au JO le 29 décembre 2023 – arrêté du 3 janvier 2024 publié au JO le 10 janvier 2024
Contexte avant le 1er janvier 2024
L’employeur qui souhaitait proposer un CDI à un salarié à l’issue du CDD (ou du contrat de mission) n’avait aucun formalisme à respecter.
La poursuite de la relation contractuelle dans le cadre d’un CDI était formalisée par la conclusion d’un avenant, sans qu’aucune procédure en amont ne soit prévue par la loi.
NB : il convient de rappeler qu’en application de l’article L.1243-10 du CT, le refus du salarié en CDD d’un CDI sur un emploi identique ou similaire assorti d’une rémunération au moins équivalente prive le salarié de l’indemnité de précarité.
Pour éviter toute contestation du salarié quant à l’absence de versement de l’indemnité de précarité, il était conseillé, en tout état de cause, de formaliser par écrit la proposition d’embauche en CDI.
Procédure à respecter introduite par la loi dite « Marché du travail »
Détaillée aux articles L. 1243-11–1 (article L.1251-33-1 CT pour les contrats de mission) et R.1243-2 (R.1251-3-1 CT pour les contrats de mission) du code du travail
Lorsque l’employeur propose au salarié en CDD que la relation contractuelle se poursuive sous la forme d’un CDI pour occuper le même emploi (ou un emploi similaire) assorti d’une rémunération au moins équivalente pour une durée du travail équivalente relevant de la même classification et sans changement de lieu de travail, il doit lui notifier cette proposition par écrit (par LRAR, courrier remis en mains propres ou tout autre moyen donnant date certaine à sa réception) et ce, avant le terme du CDD.
L’employeur doit laisser au salarié un délai raisonnable pour accepter ou refuser la proposition et doit lui indiquer, dans le courrier de proposition, qu’à l’issue du délai de réflexion fixé, une absence de réponse de sa part vaut refus.
Pourquoi cette nouvelle procédure ?
Cette procédure a pour corollaire la mesure introduite par la loi précitée qui prive de l’allocation-chômage les salariés en CDD qui auraient refusé deux fois un CDI sur un emploi identique ou similaire dans les 12 mois.
Ainsi, la loi impose à l’employeur d’informer France Travail (ex Pôle Emploi) en cas de refus du salarié en justifiant le caractère similaire de l’emploi proposé.
L’information par l’employeur à France Travail est réalisée par voie dématérialisée sur le site :
https://www.demarches-simplifiees.fr/commencer/refus-de-cdi-informer-francetravail.fr
L’employeur dispose d’un délai d’un mois à compter du refus du salarié pour réaliser l’information à France Travail qui doit en outre contenir des éléments permettant de justifier dans quelle mesure :
- L’emploi proposé est identique ou similaire à celui occupé,
- La rémunération proposée est au moins équivalente, la durée de travail est équivalente, la classification de l’emploi proposé et le lieu de travail sont identiques.
Pour les contrats de mission, le poste proposé doit simplement être identique ou similaire sans changement de lieu de travail.
L’information devra également être accompagnée de la mention du délai laissé au salarié pour se prononcer sur la proposition du CDI et de la date de refus exprès du salarié, ou en cas d’absence de réponse, de la date d’expiration du délai prévu au terme duquel le refus du salarié est réputé acquis.
Si France Travail constate que les informations fournies sont incomplètes, il adresse une demande d’éléments complémentaires à l’employeur qui dispose alors d’un délai de 15 jours pour répondre.
Dès que les informations sont complètes, France Travail informe le salarié des conséquences du refus du CDI sur l’ouverture de ses droits à l’allocation chômage.
Son refus n’aura aucune conséquence sur des droits au chômage :
- Si le salarié a été employé dans le cadre d’un CDI au cours des 12 mois précédents,
- Si la dernière proposition de CDI adressée au salarié n’est pas conforme aux critères prévus par le projet personnalisé d’accès à l’emploi (élaboré par France Travail avec le demandeur d’emploi) sous réserve que ce projet ait été élaboré avant la date du dernier refus pris en compte.
Sanction applicable si l’employeur ne respecte pas la proposition de poste en CDI et la procédure d’information à France Travail
Aucune sanction n’est prévue par la loi.
- Vis-à-vis de France Travail : le texte ne prévoit pas la possibilité pour France Travail de contrôler et sanctionner l’employeur pour le non-respect de la procédure d’information ;
- Vis-à-vis du salarié : le salarié a priori ne contestera pas le non-respect de la procédure de proposition de poste et d’information à France Travail puisque cette mesure est destinée à le priver des allocations chômage.
Compte tenu des démarches à accomplir vis-à-vis de France Travail (déclaration en ligne accompagnée d’éléments à fournir) et de l’absence de sanction pour défaut d’information, il est peu probable que cette procédure soit largement appliquée par les entreprises.
Le suivi de cette procédure pourra cependant être utile à l’employeur qui souhaiterait se prémunir d’une éventuelle demande, par le salarié, de versement de l’indemnité de fin de contrat afférente à son CDD.
Mathilde TAN